Une console estampillée Apple ? Pas exactement, on devrait plutôt parler d’une console à technologie Apple.
En effet, ce dernier décide de se lancer dans le monde des consoles, se prémunissant d’un atour qu’il juge alors de taille : le multimédia. Surfant sur la vague des plates-formes pas uniquement réservées au jeu, Apple reprend le principe des 3DO et autres CDI, à savoir une architecture logicielle et matérielle standardisée et vendue sous licence.


La première annonce concrète vient alors durant le MacWorld Expo de Tokyo se déroulant début 1995. Bandai annonce l’achat d’une licence et présente le premier prototype de ce qui sera la Pippin. D’abord annoncée sous le nom de Power Player, puis sous le nom de Pippin Power Player, elle deviendra finalement la Pippin @mark.
Lors du salon, le prototype présenté fait beaucoup plus penser à un mix entre un PC de bureau (ou devrait-on dire un Macintosh) et un magnétoscope. Il faut dire aussi que face aux Sega Saturn et Sony Playstation fraîchement sorties, Apple se devait de se démarquer de la concurrence. La machine est donc clairement axée sur la communication, et propose même un modem fourni avec sa machine. Un navigateur Internet est lui aussi présent.
Outre cela, reste les applications multimédia. Apple tente d’éviter l’ornière dans laquelle étaient tombés la 3DO et le CDI. Ainsi, pas de films sur la Pippin, un peu de logiciels d’apprentissage et d’éveil, mais surtout des fonctions permettant de l’utiliser comme un vrai petit ordinateur. Ainsi, on trouve en package avec la console un CD comprenant un traitement de texte, un logiciel de dessin ainsi qu’un logiciel de mail.
Et cela se sentait jusque dans la conception de la manette. Cette dernière intègre un trackball assez bien placé permettant d’éviter de brancher une souris (ce qui est tout de même possible). Une très bonne idée, mais qui ne pallie pas au problème de l’écriture. Un clavier virtuel est présent, mais cela ne suffisant toujours pas, il est aussi possible d’opter pour un vrai clavier en achat séparé. On trouvait aussi une imprimante, transformant vraiment cette console en ordinateur bureautique. On trouvait même des extensions mémoire, sous forme de cartouche – et donc au format propriétaire Pippin – qui permettaient d’augmenter la mémoire à 13 Mo au total.
Bien entendu, les jeux n’étaient pas en reste avec Bandai qui, fort de ses licences de nombreuses séries d’animation japonaises, n’hésitait pas à mettre en avant des jeux à fort potentiel comme Dragon Ball Z ou Ultraman.
Le Japon manquant de matériel communiquant, le marché était à prendre.
La machine doit alors sortir pour le Noël 1995, mais il faudra attendre mi-96 avant de pouvoir s’essayer à la machine.

On n'a jamais vu autant de possibilités de branchement sur une console !
On n'a jamais vu autant de possibilités de branchement sur une console !


Au niveau de la fabrication, la console de Bandai a été fabriquée aux petits oignons. Le transfo est intégré, et une prise à embout classique fait tout à fait bien l’affaire. Ce transfo accepte du 100 au 220V, ce qui permet de la brancher sans problème dans nos contrées.
Au niveau des sorties vidéo, c’est encore mieux, on peut choisir entre une sortir VGA, du PAL ou du NTSC, en composite ou en S-Vidéo.
Chapeau bas messieurs !


Mais comment faire pour avoir une machine transformable aussi facilement en petit ordinateur ? En utilisant la technologie Macintosh de l’époque bien entendu !
Architecturée autour d’un processeur PowerPC de type 603 et reprenant l’architecture globale d’un Mac, on avait entre les mains une console surpuissante pour l’époque. Mais en plus de cela, des technologies propres, dédiées à l’affichage (jeu oblige), étaient elles aussi présentes. Les détracteurs arguant que ce n’était qu’un simple Mac relooké pouvaient donc aller se rhabiller et casser du sucre sur la Xbox de Microsoft qui devait sortir quelques années plus tard.
Au niveau du système d’exploitation, pas de surprises : nous sommes bien en présence d’un MacOS modifié. Cela permettait entre autre une portabilité des logiciels et surtout des jeux Mac vers la Pippin aisée. Si bien que certains jeux, afin de rentabiliser les coûts de production et de toucher un plus large public, sortirent en multi support, fonctionnant aussi bien sur Mac que sur Pippin. Racing Days R de Bandai et un de ces rares jeu à utiliser cette possibilité. Le système d’exploitation étant contenu sur le CD et non en mémoire morte dans la machine, il était aussi facile de faire évoluer les possibilités, et surtout de les adapter en fonction des besoins du jeu ou du logiciel afin de gagner un maximum de temps de chargement et de place en mémoire.
On avait donc une machine aussi puissante qu’un Mac d’entrée de gamme, et optimisée pour les jeux. Une bombe sur le papier…

La jolie boite rouge de la Pippin de Bandai, en version japonaise.
La jolie boite rouge de la Pippin de Bandai, en version japonaise.


…Mais une bombe qui tardera trop à sortir ! Comme précisé ci-dessus, la console ne sort qu’au printemps 1996 au Japon alors qu’elle devait sortir à la fin 1995. Durant ce relativement court laps de temps, le marché évolue, le média Internet explose, prouvant qu’Apple avait eu le nez creux. Le problème vient du fait que les prix des PC avaient grandement baissé, et que beaucoup lorgnaient du côté de ces boîtes multimédia permettant de faire tourner Internet sans avoir besoin d’un ordinateur.
Néanmoins, Bandai, par sa filiale Bandai Digital Entertainment, sortira la console le 27 mai 1996. Quelques temps plus tard, la version américaine verra le jour. La version japonaise se nommant @mark (ou Atmark), la version américaine se nommera @world, et sera de couleur noire. A part le packaging, rien ne différencie ces deux consoles.
Une sortie en Europe est prévue, Katz Media est même pressenti pour être le distributeur officiel, mais il n’en sera rien.


La sortie de la console sera un terrible échec. Vendue 49 800 yens, soit environ 370 euros, la console est presque deux fois plus chères que ses concurrentes directes Saturn et Playstation. Le modem très lent de 14Kbps déplais et sera bien vite remplacé par un beaucoup plus correct 33Kbps.
Après 42 000 unités vendues laborieusement (30 000 au Japon et 12 000 aux Etats-Unis), Bandai arrêtera là le massacre et stoppera la production de Pippin en juin 1997. On est loin des 200 000 unités que Bandai avait prévu de vendre la première année !
Il continuera de soutenir sa console tout de même, mais ce ne sont pas les jeux éducatifs qui feront regretter son arrêt.
Une tentative de relance sera bien faite en février 1997 lors du MacWorld Expo, avec la présentation d’une nouvelle version de la Pippin, nommée Pippin PD qui propose un port d’extension SCSI et un lecteur de CD plus rapide que la 4x original, mais le projet sera bien vite abandonné.
Le prototype nommé Atmark EX sera par contre réutilisé par la suite, puisque pour limiter la casse, la licence Pippin sera revendue à Katz Media qui s’en servira pour faire des machines plutôt réservées aux entreprises pour des présentations multimédia et de l’accès à Internet.

Capture d'écran de l'un des CD fournis avec la machine.
Capture d'écran de l'un des CD fournis avec la machine.


Encore un flop pour Bandai qui, après l’échec de sa Playdia se relancera encore dans le mondes des machines de jeu vidéo avec la Wonderswan qui connaîtra tout de même un succès plus conséquent.
Apple, quant à lui, fermera sa division Pippin lors du retour en grande pompe de Steve Jobs à la direction de la firme qu’il avait créé. Une Pippin réellement estampillée Apple était-elle en création ? Rien n’avait filtré, mais il reste tout de même des traces d’une console à moitié estampillée à la firme de la pomme, preuve d’un ovni dans le monde des consoles. Une machine intéressante historiquement, mais à réserver aux collectionneurs.

::Source principale : Fab (Game Fan)::


Les accessoires fournis avec la Pippin. On peut noter principalement un modem 33.6Kbps.
Les accessoires fournis avec la Pippin. On peut noter principalement un modem 33.6Kbps.


Le pad de la Pippin propose un trackball bien pratique intégré, et deux boutons sur le dessus.
Le pad de la Pippin propose un trackball bien pratique intégré, et deux boutons sur le dessus.

Bandai / Apple Pippin AtMark (@Mark) côté technique

Microprocesseur : PowerPC 603 à 66 MHz
Mémoire vive : 6 Mo extensibles à 13 Mo
Mémoire morte : 4 Mo
Vidéo : 640 x 480 pixels en 16 777 816 couleurs
Son : 16 bits 44 KHz
Prix d'origine : 49 800 yens (environ 370 euros)