Chroniqué par Nicolas Gilles
Non, rien à voir avec l’émission de télévision diffusée entre 1988 et 1999. Dans cette version jeu de société nommée Ex Libris, vous allez devoir constituer et surtout trier votre collection de livres. Et il y a pas mal de boulot.Renegade Game France, en force
Renegade Games est un éditeur américain qui commence à faire parler de lui, si bien qu’une filiale française indépendante a même été créée, et se charge de localiser les jeux.
Ex Libris est le troisième jeu édité par Renegade, qui a pas mal fait parler de lui avec le très bon Clank!, un jeu mêlant exploration et deck building.
Il est souvent reconnu pour ses jeux aux mécanismes plutôt malins, et au matériel parfaitement édité, comme vous allez pouvoir le constater avec le Ex Libris qui nous intéresse ici.
Une boîte bien remplie
La boîte d’Ex Libris est plutôt pas mal remplie, avec principalement des cartes, plus de 150, pas mal de meeples de toutes les couleurs et de toutes les formes, un (petit) plateau de jeu et pas mal de plateaux en carton.
Le plateau de jeu, lors du premier tour.
L’ensemble respire la qualité, et est richement illustré. La direction artistique est d’ailleurs vraiment splendide. Tout cela explique notamment le prix assez élevé du jeu (autour de 50 €).
Au passage, saluons le travail titanesque de traduction des différents titres de chaque livre. Tout respecte l’ordre alphabétique imposé et intègre des myriades de références et autres traits d’humour.
Il est d’ailleurs assez dommage de ne plus trop y prêter attention après la première partie, tant on se concentre sur le haut des cartes, qui fournit les informations nécessaires pour les classer.
Le principe d’Ex Libris : devenir le meilleur bibliothécaire. Oook!
Dans Ex Libris, vous devez classer vos livres. Pour cela, vous devez collecter des cartes bibliothèque que vous prenez dans votre main, puis vous devez les archiver, c’est à dire les placer devant vous.
Afin d’archiver vos cartes et ainsi constituer votre collection, Ex Libris utilise un système de pose d’ouvriers.
Le plateau de jeu en fin de partie.
A chaque tour, on pioche aléatoirement deux plateaux proposant chacun une action. A la fin du tour, on n’en garde qu’un pour en piocher deux nouveaux pour le tour suivant. Du coup, on se retrouve assez vite avec un éventail assez large d’actions et, surtout, des actions qui ne sont absolument pas linéaires d’une partie à une autre. Cela permet un beau renouvellement.
Les joueurs, à leur tour, placent ensuite un de leur trois apprentis sur les emplacements disponibles. Classique, mais le placement d’ouvrier reste une valeur sûre.
Seulement voilà, vous avez pas mal de contraintes pour les archiver correctement :
- Tout doit être classé dans l’ordre alphabétique
- Vous devez les ranger bien comme il faut, c’est à dire en trois rangées maximum, toute carte archivée ne peuvent l’être qu’à côté d’une autre carte déjà archivée
- Vous devez également respecter les contraintes des six types de livres
Le classement par ordre alphabétique peut sembler fastidieux (rappelons qu’Ex Libris se compose de plus de 150 cartes livres). Pourtant, il n’en est rien. En haut des cartes, les informations sont judicieusement appelée : type de libres présents sur la carte et emplacement de la carte. Tout se place donc très bien, que l’on soit habitué à l’ordre alphabétique ou non.
Salade de points
Ex Libris, c’est une salade de points. Il faut donc avoir l’oeil partout, et ce n’est clairement pas toujours évident. A la fin de la partie les points sont gagnés de la façon suivante :
- Taille des étagères : tous les cartes adjacentes réalisant un beau carré ou rectangle rapportent un point chacune
- Le bonus des livres les plus appréciés (le type est défini aléatoirement en début de partie)
- Le malus des livres bannis (également défini aléatoirement en début de partie)
- Le bonus de votre propre type de libres (que vous récupérez de façon cachée en début de partie)
- Le bonus de la catégorie la moins représentée dans votre collection : chaque bouquin de ce type vous rapporte alors 3 points
Les meeples sont particulièrement variés, mais ce n'est pas gratuit !
C’est surtout la catégorie la moins représentée qui pose le plus de problèmes… Mais dans tous les cas, il est quasi impossible d’anticiper si vos adversaires sont devant vous ou non en terme de score.
Le tout, c’est d’avoir au moins autant de cartes que les copains, car le premier à atteindre un certain nombre, variable en fonction du nombre de joueurs (par exemple, à deux c’est 16 cartes), déclenche une dernière manche, puis la fin de la partie. Autant dire qu’il ne faut pas être trop à la bourre en terme de nombre de cartes archivées.
Entre stratégie et embûches
Le jeu tourne parfaitement bien peu importe le nombre de joueurs. Les interactions sont assez limitées : on pique des cartes ou des emplacements aux adversaires, mais il y a de quoi échanger (parfois vertement) avec ses petits camarades.
De plus, le choix de son personnage au début de la partie va à la fois influencer votre façon de jouer et votre façon d’interagir avec les autres joueurs. Certaines cartes vous donnent des pouvoirs sur votre jeu, tandis que d’autres viennent nuire aux autres (comme par exemple vous procurer une action supplémentaire si un autre joueur vient partager votre action).
Le jeu revêt donc différentes facettes en fonction du nombre de joueurs et des personnages que jouent chacun. A deux, cela fonctionne tout aussi bien et est, une fois de plus, plus stratégique : on peut observer plus facilement ce que fera l’adversaire histoire de le bloquer (le petit salopiaud).
Les actions se basent sur de la pose d'ouvrier.
A noter que la variante solo ne m’a pas vraiment convaincue car elle diffère pas mal du jeu d’origine. Déjà, tous les plateaux d’actions sont disponibles dès le début. L’objectif est de battre un adversaire factice, mais cela ne remplacera jamais un adversaire bien réel.
Choisir, c’est renoncer
Tout le sel d’un bon jeu de plateau tient dans le sentiment de frustration qu’il procure. C’est assez paradoxal, mais c’est en grande partie de là que vient le plaisir de jouer à des jeux (surtout pour les jeux à l’allemande).
Ex Libris n’y fait pas exception. Le fait de ne disposer que de trois lignes pour ranger sa collection vous impose des choix souvent cornéliens. Vous commencez par faire une colonne avec un D dans la ligne du haut, un M dans la ligne du milieu et un S dans la ligne du bas. Avec ça, vous vous dite que vous avez de quoi parer à toutes les situations.
Sauf qu’arrive un A ou un F… Allez-vous le placer à côté du D, quitte à faire définitivement une croix sur l’ensemble des livres de la lettre E ?
Différentes stratégies s’offrent à vous : ratisser large, ou au contraire la jouer serré, en ne vous concentrant que sur le début de l’alphabet par exemple. Mais dans tous les cas, il va vous falloir faire avec les aléas de la pioche.
Vous commencez light, et construisez petit à petit votre étagère.
Le stylo Velleda : la super bonne idée
Dans les jeux où on a une de salade de points, on a souvent un bloc de papiers où l’on note les différents scores de chacun. Du coup, à chaque partie en bousille une feuille.
Moi qui aime le côté rejouable à l’infini des jeux de société, je n’utilise pas ces feuilles. Je les gardes religieusement dans la boîte, tâchant de ne pas les corner, et utilise plutôt une feuille volante qui fait tout aussi bien l’affaire. Oui, je suis un peu con parfois, mais je suis comme ça.
Sauf que là, les concepteur d’Ex Libris ont eu ce qui est à mes yeux un trait de génie : plutôt que de proposer un bloc de feuilles, ils ont plutôt proposé un stylo effaçable et une planche pré-imprimée avec une surface de type tableau blanc. Du coup, une fois terminé, vous effacez les scores et remettez le tout dans la boîte !
Simple, pratique, malin, bref, une idée que j’aimerai retrouver beaucoup plus souvent dans les boites de jeux de société.
Peu à peu, votre étagère prend forme, mais attention à respecter l'ordre alphabétique !
Les plateaux de jeux personnel sont tous uniques... et nombreux.
Le coup de génie pour compter les points : exit les blocs de feuilles !
Thermoformage toujours aussi bon chez Renegade.
Ex Libris, un jeu pour 1-4 joueurs de Adam P. McIver, illustré par Jacqui Davis, Adam P. McIver et Anita Osburn, édité par Renegade pour des parties d'environ 30-60min.
Age conseillé : 12+.