Euphoria annonce le ton : "Construisez une meilleure dystopie". Un sacré programme pour un jeu de gestion assez velu.

Alan Stone et Jamey Stegmaier, avant Scythe


Avant le désormais légendaire Scythe, il y a eu plusieurs jeux imaginés par Jamey Stegmaier, dont le Euphoria qui nous intéresse ici, et qu’il a imaginé avec son co-auteur, Alan Stone.

Un duo qui fonctionne plutôt carrément pas mal puisque, deux ans plus tard, ils remettent le couvert pour nous proposer le très bon Viticulture.

Le jeu a été lancé sur Kickstarter en 2013. Il a réuni la somme de 309 495 $ sur les 15 000 $ demandés, réunissant quelques 4 765 contributeurs. Plutôt un bon score pour un jeu de ce genre !

Euphoria sortira dans le commerce un peu plus tard, y compris en version française. La version que vous voyez sur les photo et qui a servi pour cette chronique est la version boutique, et non la version Kickstarter.

Le plateau de jeu d'Euphoria.
Le plateau de jeu d'Euphoria.

Le matériel


Comme vous pouvez le voir, même si ce n’est pas une version Kickstarter, le résultat est déjà très bon, avec une boite assez lourde et pleine de beau matos.

Déjà, le jeu propose une identité visuelle très forte. En reprenant les visuels de propagande de la Russie des années 50, Euphoria vous met directement dans le bain. Je lui trouve également une petite inspiration d’un certain Bioshock Infinite en jeu vidéo, vous ne trouvez pas ?

La boite est bien remplie, avec un grand plateau bien lisible, des cartes, beaucoup de ressources en bois aux formes et aux couleurs diverses, et surtout des dés spéciaux très esthétiques, de différentes couleurs.

Les règles


Bon, là, c’est vraiment un gros morceau… Vu qu’il y a 20 pages de règles, je ne vais faire ici que vous les résumer.

Votre but ultime, pour remporter la partie, c’est d’être le premier à placer vos dix étoiles. Oui, comme dans Scythe (lui n’en a que six). Sauf que là, c’est le premier qui les pose qui met fin à la partie et remporte la victoire, il n’y a pas d’autre système de comptage des points.

Les dés sont au cœur du gameplay, tout en limitant le hasard.
Les dés sont au cœur du gameplay, tout en limitant le hasard.

Euphoria se base sur un principe classique de pose d’ouvriers. Mais là où il propose un concept novateur, c’est que vos ouvriers sont constitués par des dés.

Chaque joueur dispose de quatre dés à sa couleur, qui correspondront à ses ouvriers qu’il placera sur le plateau. Mais au début du jeu, on ne commence qu’avec deux dés. Il va falloir débloquer les suivants… Et le pire, c’est que vous ne les garderez pas forcément !

Car vos ouvriers disposent d’une jauge de lucidité que vous ne devrez pas dépasser (c’est à dire que la somme des dés que vous lancez ne doit pas dépasser 16), sous peine de perdre l’un d’entre eux ! Vous pourrez le recruter à nouveau, mais cela vous coûtera du temps et des ressources, forcément.

Cette jauge de lucidité se lie à une jauge de moral de vos équipes, et permet de définir le nombre de cartes artefact que vous avez en main.

Pour un jeu de gestion, le thème est vraiment très étroitement lié aux mécaniques.

Les matières premières sont très nombreuses et variées !
Les matières premières sont très nombreuses et variées !

A votre tour


A votre tour, vous pouvez : soit poser l’un de vos dés / ouvriers encore en réserve, soit récupérer un ou plusieurs dés ouvriers, les lancer et les mettre dans votre réserve.

Si vous posez un dé, vous devez payer le coût de l’action afin de réaliser cette action. Et des coûts, ils y en a de toutes sorties.

Déjà, vous avez les matières premières (Énergie, Nourriture, Eau, et un truc nuageux bizarre), des ressources (Or, Pierre et Argile), et enfin des artefacts. Les premiers sont matérialisés par des pions en bois tandis que les artefacts sont représentés par des cartes.

Différentes factions


Sur le plateau, on distingue quatre univers, correspondant à quatre cités, soit quatre factions aux aptitudes différentes. Chacune est spécialisée dans certaines matières premières et certaines ressources.

Tout au long du jeu, vous pourrez intervenir sur chacune d’entre elles. Les Euphoriens sont spécialisés dans l’énergie et l’or, les Westlanders dans la nourriture (on est forts sur la pomme) et l’argile, les Subterans dans l’eau et la pierre. Les Icarites, dans le ciel, sont un peu plus particuliers et se spécialisent dans la production de nuages verts (des pets ou de la drogue ?) et favorisent l’achat de cartes artefact.

Plus qu'un jeu de placement d'ouvriers, Euphoria est un jeu de placement de dés.
Plus qu'un jeu de placement d'ouvriers, Euphoria est un jeu de placement de dés.

Toutefois, vous disposez en début de partie de deux cartes spécialistes, qui correspondent à chacune à l’une de ces factions. Ces spécialistes vous permettent de bénéficier de bonus pour chaque action liée à la faction à laquelle ils appartiennent.

Au départ, vous n’avez qu’une seule carte activée sur les deux. L’autre se débloque dans la deuxième moitié de la partie, en fonction des actions réalisées par l’ensemble des joueurs sur la faction à laquelle appartient votre deuxième carte.

Vous pourrez alors bénéficier de leur bonus… Mais les autres joueurs vont-ils jouer cette faction ? Car si personne n’utilise les actions qu’elle propos, vous ne débloquerez jamais votre carte… Encore un aspect stratégique à prendre en compte en début de partie.

Une gestion très fine des dés


Proposer un jeu de gestion avec des dés, ce n’est pas forcément évident. Non pas que Euphoria soit précurseur dans le genre (on a eu quelques pépites comme Troyes notamment), mais tout de même, cela ne reste pas très banal.

Et finalement, c’est cette mécanique centrale liée aux dés et à leur valeur - très permissive - qui donne toute sa personnalité à Euphoria, et souligne la nationalité américaine de ses auteurs, puisque là bas on aime bien le hasard.

Toutefois, ce hasard est limité comme il faut, bien que l’on soit très loin de la maîtrise que l’on peut avoir avec un Agricola par exemple.

Les cartes artefact, au centre du jeu


Si au début de la partie vous n’y prêterez pas très attention, les cartes artefact se révèleront cruciales en fin de partie, car elles permettent très souvent de déposer les précieuses étoiles qu’il vous reste encore en main.

Cela ouvre le feu à tout un tas de stratégies. Cela structure également la partie en trois grandes phases, correspondant à différentes ressources : d’abord les matières premières, puis les ressources (or, pierre, argile), et enfin les artefacts. Bien entendu, l’ensemble se mêle habilement.

Un jeu de gestion qui peut se jouer jusqu’à 6 jours


Souvent les jeux de ce genre sont calibrés pour quatre joueurs au maximum, voir cinq. Euphoria, lui, peut vous permettre de réunir jusqu’à six personnes autour de la table.

Le jeu tourne bien à deux, mais comme tout son sel se révèle au niveau des interactions entre les joueurs, du coup, il est plus intéressant d’y jouer à 4 ou 5, voir 6 joueurs. Les parties sont plus longues, mais également plus sympas.

Et c’est bien pratique quand on veut sortir un jeu assez conséquent et que l’on est six autour de la table !


Euphoria, un jeu pour 2-6 joueurs de Alan Stone et Jamey Stegmaier, illustré par Jacqui Davis, édité par Morning Players pour des parties d'environ 60min.
Age conseillé : 13+.
Excellent !

Euphoria

Euphoria n’est pas si complexe qu’il en a l’air… Le tout, ça va être d’expliquer les règles. Les parties sont assez variées, et le choix des différents spécialistes vous oblige à adapter vos stratégies et à tester de nouvelles tactiques de jeu. Toutes les configuration fonctionnent bien, mais privilégiez tout de même 3 ou 4 joueurs.

La note : 5/6 (Excellent !)